1 stage + 1 faux attentat = la bien bonne rentrée

Il y a un côté euphorisant au chômage.

En fait un côté complètement bipolaire, mais je suis quelqu’un de positif, tu vois. Oui, il y a des jours où tu te lèves tard, où tes cheveux restent sales et ton pyjama en place jusqu’à ce que la honte de regarder Columbo sur TV Breizh à 15h en picorant des Chocapic à même le paquet te rattrape soudain. Et puis parfois il faut faire la vaisselle ou des courses, et c’est DUR parce que Netflix enchaîne les épisodes de Downton Abbey sans te demander si ton frigo est vide ou ton évier enfoui sous les assiettes sales.

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Popopo ma pauv’dame, c’est dégoûtant chez toi

Mais parfois, Internautre, parfois ! Ah ! Parfois, tu dors bien, sans cauchemars ni agitation, paisiblement, et le soleil entre par un côté du rideau occultant. Tu as envie de sauter dans la douche tout de suite, tu as rendez-vous avec un ami pour déjeuner, et quelqu’un te propose un projet que tu acceptes avec joie. Est ce ta chorale qui a besoin d’un programme ? Ta famille qui veut organiser une chasse au trésor pour l’anniversaire du petit frère ? Ta coach pro qui t’a regonflé l’égo la veille ? Une perspective d’activité qui pourrait ressembler à un métier ?

En fait tout ce qui ressemble à un objectif fait l’affaire. Tu te sens UTILE, VALORISE. Par simple contraste avec la journée pyjama – Columbo de la veille, tu as l’impression que tu pourrais absolument TOUT faire. Car c’est l’avantage quand tu ne fais rien. Tu as potentiellement la place de t’investir dans ce que tu veux.

Alors selon le temps qui fait, les gens qui pensent ou pas à toi, selon s’il reste du pain de mie à tremper dans ton (vrai) chocolat chaud (parce que tu as le temps, n’oublie pas !), le rien de ta journée deviens le néant du désespoir ou au contraire un terreau propice aux rêves et aux possibilités.

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Chômage, allégorie

Le métier de journaliste m’a toujours plus ou moins attirée, pour cause de j’aime écrire bien sûr, mais aussi par goût de la transmission, et de la juste synthèse mêlant l’accessibilité et l’exactitude de l’information. J’ai donc contacté une journaliste avec comme objectif de glaner quelques infos sur son métier, bref, en deux mots comme en cent, elle m’a filé une offre de stage, j’ai répondu, le lendemain j’avais entretien, une heure après je sortais avec la convention signée (car Pôle Emploi fait des conventions de stage mon bon, parfaitement !).

Ca s’est passé tellement vite que je n’en revenais pas. Pour te dire, il y a des pots de danette que j’ai mis plus de temps à choisir au Monop que cette rédaction n’en a pris pour me choisir moi. Pendant deux semaines avant de démarrer le stage, j’ai oscillé entre le contentement d’avoir un objectif et la panique de partir sur un nouveau truc sur un coup de tête sans savoir à quoi ça allait me mener. Et puis je me suis rappelée que de toute façon j’étais partie pour être parfaitement inactive pendant le temps de ce stage, ce qui aurait certainement mené à moins de choses encore, quelque part entre avancer mes séries sur Netflix et procrastiner devant les moutons narguant l’aspirateur.

Il ne m’a pas fallu plus de 2 semaines de stage pour expérimenter le cauchemar de tout journaliste de cette décennie : l’attentat. Enfin, le faux attentat bien sûr, sinon je n’aurais pas entamé ce billet avec tant de désinvolture. Que je te narre.

Tout a commencé quand ma collègue est rentrée dans l’open space avec l’air plutôt stressé. Et en effet, il y avait de quoi : « Euh, apparemment il y a un homme armé et il faut descendre dans la rue », a-t-elle balbutié. Elle n’avait même pas fini sa phrase que ma chef partait littéralement en courant, faisant dégringoler une pile de gobelets au passage, tandis que je prenais mécaniquement ma veste et mon téléphone pour suivre ma collègue. Pas mal de monde descendait des étages du dessus vers la rue, dont deux policiers en gilets pare balle, qui dévalaient les escaliers – sans pour autant rattraper ma chef qui avait déjà passé le mur du son – en criant « POUSSEZ VOUS SUR LE CÔTE ». Une fois dehors, nous étions un peu bêtes, sur le trottoir, à nous demander pourquoi la police était au même endroit que nous, ce qui semblait signifier que notre tentative pour nous éloigner du danger n’était pas vraiment couronnée de succès. On pouvait même dire que c’était complètement con.

Alors dans un bel ensemble, des gens qui comme moi doutaient un peu ont interrogé les policiers pour savoir où nous devions aller, la maréchaussée a dit qu’on devait se pousser, ma chef s’est mise à hyperventiler en criant « MAIS OÙ, MAIS OÙ » et quelqu’un a crié « ALLAH AKBAR ». « Allah Akbar » qui veut tout simplement dire « Dieu est grand », ce qui se veut plutôt positif, mais qui dans ces sombres périodes terroristes et en particulier quand on s’attend à voir un homme armé surgir au coin de la rue veut plutôt dire « CHERI CA VA COUPER ». La foule se scinde alors en deux morceaux, ceux qui paniquent, et ceux qui ont reconnu la voix de Fab, le mec de l’informatique, qui a décidément un humour pas piqué des hannetons. A une vache près il aurait pu se faire descendre par la police, mais le con était chanceux et il s’est juste fait pourrir par la direction.

La police nous a alors informés qu’à la base ils étaient montés sur notre toit pour avoir un visuel sur un homme potentiellement armé repéré sur un toit voisin, ce qui voulait dire que non seulement nous pouvions remonter dans nos bureaux, mais que de toute évidence il ne servait pas à grand chose qu’on en soit descendus.

En remontant on a retrouvés les deux tiers de nos collègues à l’endroit où on les avait laissés, en train de réfléchir à la procédure plus du tout d’urgence à suivre.

Une demi heure plus tard, personne ne s’était encore remis au travail, persuadés qu’un fou armé était en cavale en plein 7e arrondissement, et relativement inquiets que ma chef ne soit pas remontée en même temps que nous. A ce stade, j’envisageais sérieusement qu’elle soit rentrée chez elle en courant.

Encore quelques minutes plus tard, plus calme après un détour par le café en compagnie d’un collègue dans l’avant bras duquel elle avait incarcéré ses ongles, ma chef rentrait au bureau et un mail dans ma boîte pro. Mail qui nous informait que l’homme supposément armé était en réalité un couvreur.

Parfaitement, ce pauvre homme était tout simplement en train de poser ses tuiles lorsqu’il a été repéré par la maréchaussée, menant subséquemment au bordel sus-décrit.

Arrêtez, malheureux ! Criminel !

Un couvreur.

Heureusement que Fab s’est pas fait buter.

DDIY le retour – la trousse de toilette mi-chiée

Très cher Internautre,

Je suis bien aise de revenir en ce jour avec ce superbe non-tuto, aussi appelé Don’t Do It Yourself (sérieusement, je ne devrais pas persister). Comme tu sais peut être si tu as suivi mes autres posts de DDIY, je suis particulièrement manche dans toute activité nécessitant dextérité, précision et patience. C’est donc tout à fait logiquement que je me suis lancée dans la couture, qui nécessite toutes les qualités susdites, et aucune des miennes (soit un incroyable sens de l’humour qui laisse ma machine parfaitement froide, une propension surnaturelle à faire tomber des trucs, et une verve qui ne m’aide à aucun moment à faire des noeuds corrects).

Cependant, je possède un vrai atout que je ne manquerai pas à nouveau de mettre à contribution dans l’expérience textile qui fait l’objet de ce chatoyant post. Je dispose en effet d’une forme de persévérance qui, en réalité, tient plus de la naïveté enfantine nourrie par Disney et qui stipule que le gentil héros finira forcément par triompher malgré les obstacles.

Alors lorsqu’un beau matin, ma superbe trousse de toilette Space Invaders achetée il y a 7 ans a vu ses entrailles complètement à l’air pour cause de défaillance irréversible de sa fermeture éclair, j’ai pris les choses en main.

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La défunte

J’aurais sans doute pu tenter de la réparer et de remplacer la fermeture éclair. Mais DEDIEU, comme dit mon papa, comment fait on ? Il aurait certainement fallu que je commence par l’ouvrir sur un côté puis la recoudre, et j’avais peur de la massacrer. Autre souci qui ne m’est apparu qu’après avoir terminé ma nouvelle trousse objet de ce DDIY, l’épaisseur du tissu plastique m’aurait probablement obligée à la coudre par le truchement d’un marteau piqueur relié à une aiguille.

Comme je voulais pas me lancer complètement à l’aveugle, j’ai trouvé sur YouTube un très bon tuto, que toute personne vaguement appliquée (= pas moi) saura suivre sans problème.

Etape 1 : couper le tissu aux bonnes dimensions

Comme à chaque fois, mon premier moment de galère arrive extrêmement tôt. A la seconde 1 en vérité, puisqu’après avoir tenté de créer un reclangle à angles droits avec un triple décimètre comme seule arme car je ne souhaitais pas obtenir une trousse en forme de losange, j’ai finalement réussi à dessiner un semblant de quadrilatère à angles droits. Puis j’ai bien sûr soigneusement coupé le long d’une ancienne ligne qui traversait le rectangle désiré. Parfaitement.

J’ai donc TOUT recommencé, sans plus de moyens de réussir correctement. Je comprends maintenant pourquoi les meufs qui font des tutos ont des tapis spéciaux.

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En fait c’est pas pour faire joli

Le résultat était pas joli joli, mais bon j’aurais qu’à tout mettre à niveau après, tant qu’ya du tissu ya de l’espoir !

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Admire moi cette incroyable découpe parfaitement symétrique, ça te tirerait quasi une larme

 

 

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On voit pas bien, mais je pense que tu peux deviner quel doigt est montré sur cette image

Etape 2 : coudre toutes les épaisseurs entre elles

Petite difficulté inattendue : dans la mesure où il s’agit d’une trousse de toilette, il fallait la tapisser d’un tissu imperméable. j’ai choisi un bout de toile cirée qui trainait dans ma réserve à tissus (= un sac plastique avec tout roulé en boule calé dans un coin de la méridienne de mon canapé, entre les décos de Noël et le linge de maison propre).

Or, quelle est la particularité de la toile cirée ? Elle est épaisse, oui. Mais la mienne avait même une caractéristique supplémentaire : son revêtement était adhérent, avec lui même et toute autre surface lisse. Comme par exemple celle de ma machine à coudre. Le résultat fut parfaitement atroce. Le tissu adhérait tellement à ma machine qu’il n’avançait plus entre les points, conduisant à une accumulation de noeuds les uns sur les autres. Dans une tentative désespérée de suppléer à l’incapacité de ma machine à faire défiler le tissu sous l’aiguille, je me mis alors à légèrement tirer le bazar en me synchronisant au maximum avec le rythme de l’aiguille. Dans un dessin animé, le pays où le maquillage se met et s’enlève d’un geste, et où les gestes humains sont parfaitement précis et efficaces, ça aurait très bien marché.

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Mulan n’a besoin que d’une manche imbibée de larmes pour se démaquiller #nocoton #noyeuxdepanda

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Ni mèche rebelle ni noeuds, ni même besoin de 5 doigts à chaque main

Mais nous sommes dans le monde réel, où les tomates moisissent, les gens d’une même famille peuvent être qui mélanchonnistes, qui macronnistes, où les histoires ne se terminent pas le jour du mariage et où les gestes de déplacement de toile cirée sous une aiguille de machine à coudre ne sont ni réguliers, ni rectilignes.

#massacre

Soit dit en passant, ma copine Lili m’a depuis informée qu’en collant du masking tape sur la machine, on pouvait éviter l’adhérence du tissu et faire un truc tout propre. Je te donne l’astuce, des fois que tu aies envie de tenter le tuto sans flinguer ta machine.

Etape 3 : sauver les apparences par flemme de recommencer

(et aussi parce que je n’avais aucun moyen de faire mieux la seconde fois, vu que je n’avais pas encore le tips du masking tape)

C’est là qu’intervient la partie talentueuse de ma personne (puisque jusque là on a plutôt vu la partie calamiteuse) : c’est parti pour le rattrapage / camouflage ! Ou comme je l’appelle, le rattraflage. Pour rattraflager votre oeuvre, pas de soucis : il suffit de continuer comme si de rien n’était, en faisant en sorte que les défauts restent planqués sur un côté masqué de votre oeuvre. En l’occurence, ma trousse ayant vocation à n’être imperméable que de l’intérieur, je savais que tous noeuds dégueulasses et autres coutures immondes seraient planquées à l’intérieur.

Il ne me restait plus qu’à faire les dernières coutures à la main, histoire de moins s’emmerder qu’avec la machine sur ce tissu de l’enfer.

Et TADAAA

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Sur une des photos, il se pourrait que tu remarques que ma trousse est plus trapézoïdale que rectangulaire. Je pourrais te dire que c’est une illusion d’optique et que tu es bien mesquin de me renvoyer la faute de ta basse vision.

Mais bon, tu sais que je n’aime pas mentir.

OK, elle est trapézoïdale.

Et à l’intérieur, on peut voir encore les tristes vestiges de la bataille menée contre les coutures qui partent en steak.

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MAIS tant qu’elle remplit son office, finalement tout va bien !

N’est ce pas ?…

Mon conseiller-gourou Pôle Emploi

  • Bonjour mademoiselle, alors dites-moi, pensez-vous que les romans de coaching comme celui que vous lisez ont une utilité ? Demande-t-il en désignant ledit bouquin sur mes genoux.
  • Je ne sais pas, je suppose que cela dépend des gens, je réponds, jugeant la question peu intéressante.
  • Ah, c’est une preuve d’intelligence, ça ! De dire qu’on ne sait pas ! S’exclame-t-il d’un ton mi surpris mi appréciateur.

J’ai toujours pensé que les gens qui nous complimentent pour notre intelligence / beauté / humour, etc. sans raison valable (en l’occurrence, juste parce que j’ai avoué que je ne savais pas quelque chose, ce qui arrive tout de même régulièrement) cherchent au fond à se positionner comme dominant. Ils se placent comme la personne qui nous valide d’emblée, sans préciser qu’il s’agit de leur opinion (ex « j’ai toujours pensé que c’était une preuve d’intelligence d’avouer son ignorance »), mais par un très affirmatif et sûr de soi « ah ça c’est une preuve d’intelligence », avec un sourire surpris qui signifie « je vous félicite, parce qu’à la base je n’avais pas spécialement une haute opinion de vous, mais à présent je vois que vous êtes digne de mon intérêt ».

Le piège à éviter, c’est de se sentir tellement flatté que l’on va avaler tout ce que dit la personne derrière comme la parole de Celui-Qui-Sait, puisqu’il nous dit que nous étions intelligent / beau / drôle, etc. Et que nous avons envie qu’il continue à nous valider, et ne pas le décevoir après une si bonne première impression.

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Viens chercher ton compliment, viens

Quand je tombe sur ce genre de comportement, je me braque directement dans mon fort intérieur. Je souris poliment mais je ne remercie pas, car je ne juge pas pour l’instant que cette personne est légitime à valider ce que je suis ou ce que je ne suis pas.

Pour le coup, il s’agissait des premières phrases de mon conseiller Pôle Emploi lors de notre premier rendez-vous. Méfiance, m’ont donc susurré mes intestins (très réceptifs à la merde). Et ils avaient raison, comme l’a prouvé la suite de la conversation.

  • Donc vous avez demandé à faire un bilan de compétences ? Il demande ça avec un large sourire qui ne remonte pas jusqu’aux yeux et qu’il aura tout le long de l’entretien, comme un genre d’étrange réflexe musculaire facial.
  • En effet, je réponds, j’ai eu tendance à m’ennuyer rapidement dans mes emplois précédents, et je voudrais trouver une activité différente et plus stimulante.
  • De ce que vous me dites, dit-il après une petite pause dramatique, c’est que vous souffrez d’un problème existentiel.
  • Qu’est ce que vous entendez par là ?
  • Et bien vous êtes insatisfaite, n’est ce pas ? Et depuis longtemps. C’est donc qu’en réalité c’est un problème existentiel, qui n’a pas de rapport avec l’activité que vous exercez.
  • Vous êtes en train de me dire qu’un bilan de compétences n’aura pas d’intérêt, car je souffre d’insatisfaction chronique quoi que je fasse ?

Le mec rit avec l’air vaguement gêné. Je crois qu’il n’aime pas mes phrases trop directes, qui résument trop à son goût une pensée qu’il ressent beaucoup plus complexe. J’avoue que je fais un peu exprès de simplifier pour le confronter à ses propos qui ne me plaisent déjà pas.

  • Bon, me dit-il, vous êtes d’accord que vous êtes conditionnée ?
  • Comment ça ?
  • Et bien, reprend-il avec son large sourire mi forcé mi réflexe, dites-moi, qui êtes-vous ?
  • Euh, une jeune femme de 28 ans qui cherche un nouveau travail ?
  • Ah ! Et est ce que ce que vous me dites de vous est spécifique à votre personne ?
  • Non, bien sûr.
  • Et donc, qu’est ce qui est spécifique à vous ?
  • Et bien ma personnalité, mon vécu, mes souvenirs, mes gènes…

J’énumère en croisant mes jambes bien serrées, déjà consciente que cet entretien sera beaucoup trop long.

  • Tout à fait, (il s’illumine comme un professeur devant un élève prometteur) ce sont vos souvenirs et votre expérience. Et tout ça c’est votre conditionnement.
  • D’accord, mais nous sommes tous conditionnés, c’est ce qui fait aussi notre individualité.
  • Bien sûr, mais il faut regarder ses pensées, de façon à pouvoir nous déconditionner, et voir la vie de façon plus globale.
  • Regardez, moi par exemple tout à l’heure je vous ai vue arriver, je me suis dit « tiens elle est jolie »

Oh non, ne va pas dans cette direction, je t’en supplie. Je sens mon visage se crisper devant la gêne qui s’installe. Gêne que lui ne ressent visiblement pas le moins du monde, puisqu’il persiste.

  • Je me dis même, continue-t-il, « elle pourrait me plaire »
  • Mais à ce moment là je me vois penser tout ça, et donc je n’ai pas le comportement que ça aurait pu entrainer, comme être plus gentil ou vous accorder un entretien plus long.

Soit dit en passant, mon entretien a duré 2h, dont à peine 10 minutes d’explications sur les formations auxquelles j’avais droit, ce qui était tout de même la raison initiale de ma visite. Donc j’aimerais bien savoir, puisqu’apparemment j’ai eu la version courte grâce à sa capacité à regarder ses pensées, combien dure le full time entretien spécial jolies filles ? Genre le mec ne peut prendre que deux rendez-vous par jour en fait.

  • Je vois. Et donc, que fait-on ? Je demande, dans une tentative de recentrer la discussion sur la raison de ma venue.
  • Haha, rit-il avec l’air indulgent du maître d’école devant un élève récalcitrant qu’il compte bien éduquer proprement, quoi qu’il lui en coûte. Diriez-vous que vous êtes confuse en ce moment ?

J’allais bientôt apprendre que toute question directe de ma part serait déviée automatiquement par une nouvelle question sans aucun rapport apparent avec le sujet.

TOURNOI D'INDIAN WELLS

Bim dans ta face la question

  • Hum oui, sur le plan professionnel je suis confuse en effet
  • Ah ! Donc vous estimez que la vie se partage en plusieurs plans différents et sans rapport entre eux, personnel, professionnel, loisirs… ? Pourtant vous êtes bien la même personne, dans toutes ces situations ?
  • Oui, c’est en effet toujours moi. (Je commence à m’agacer)
  • Donc vous voyez que vous êtes confuse. Et quand vous faites appel à une autre personne pour vous aider, comme pour ce bilan de compétences, c’est donc une décision qui est le résultat d’une confusion ?
  • Ecoutez, évidemment si je n’avais pas eu de problème je n’aurais pas eu besoin d’aide, je réponds agacée.
  • C’est sûr, continue-t-il sur sa lancée, par le moins du monde affecté par ma réponse. Mais le fait est que l’esprit ne peut pas être ouvert et regardé comme on peut le faire sur le corps, et donc qu’il n’y a que vous pour savoir ce qu’il y a au fond de votre esprit.
  • Je ne cherche pas à trouver quelqu’un qui me dira ce qu’il y a dans mon esprit, juste quelqu’un qui me guidera afin que je me pose les bonnes questions pour trouver les réponses moi même.
  • Mais dans ce cas vous pouvez très bien le faire vous même, car dans un bilan de compétences, on se focalise sur les expériences passées, or le passé c’est ce dont vous ne voulez plus ! Vous allez donc vous limiter à cause de votre confusion.

Passé ce point, il m’a semblé que la discussion tournait en rond bien comme il fallait. Je venais pour avoir une solution, pas une absence de solution.

  • Ecoutez, je réponds, volontairement directe, vous me dites depuis le début ce qu’il ne faut pas faire, apparemment un bilan de compétences, mais du coup qu’est ce que vous me conseillez de faire ?

C’était ma tentative n°2 de tirer de cette homme un contenu autre que des grands concepts vides, quelque chose qui me permettrait de mettre quelque chose en place une fois sortie de son bureau.

  • Et bien, il faut écouter vos pensées, répond-il avait l’air réjoui.

A ce moment, j’ai retenu un gros soupir de découragement. Cet homme n’était pas un conseiller Pôle Emploi, mais un gourou. Un gourou au sourire automatique.

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Exemple de rendez-vous Pôle Emploi qui tourne mal

  • Mais pas juste une fois, précise-t-il, il faut le faire chaque instant et tout au long de la journée, tous les jours ! Ainsi vous pourrez voir la vie plus globalement et vous débarrasser de vos conditionnements.
  • Vous savez que l’on change sans arrêt, vous êtes d’accord ? Reprend-il devant mon absence de réaction
  • Oui, je réponds laconiquement
  • Dans ce cas, triomphe-t-il, ça n’a pas de sens de définir vos objectifs à cet instant, puisque vous allez à nouveau changer.
  • Mais vous savez, je ne cherche pas un boulot pour la vie, hein, je suis prête à refaire la même démarche dans 5 ans, 10 ans, si jamais ça ne me plait plus à nouveau.
  • Ah ! c’est bien déjà, vous ne pensez pas que la même tâche saura résoudre votre problème existentiel toute votre vie !
  • Cela dit, je reprends, les enfants aussi grandissent sans discontinuer, et ça n’est pas pour autant inutile de les mesurer. Ils font une certaine taille à un instant, on sait que ça va changer, et ça n’empêche pas qu’il est utile de pouvoir leur trouver des vêtements à leur taille à ce moment précis.
  • Mais ça ne résoud pas le problème existentiel !

Toute cette conversation commence à me chauffer. Je réessaie encore une fois.

  • Bon, du coup, qu’est ce qu’on fait ? Je demande en regardant vers son écran d’ordinateur, que nous n’avons pour l’instant pas regardé.
  • Ah, vous voulez toujours faire un bilan de compétences ? Me demande-t-il avec l’air un peu déçu que je n’ai pas eu l’élévation d’esprit nécessaire à la compréhension de son discours.

Cet homme étant mon conseiller Pôle Emploi officiel et donc la personne qui va potentiellement valider tous mes choix de formation, je ne veux pas qu’il m’ait dans le nez. Je rassemble donc tout ce qu’il me reste de gentillesse et de bonne volonté pour lui répondre.

  • Ecoutez, je vous remercie d’avoir pris de votre temps pour m’exposer votre vision des choses, et je la prendrai en compte dans ma réflexion, mais je ne vais pas prendre cette décision maintenant.
  • Vous dites tout le temps « Je », mais qui est ce « Je » ?
  • (je soupire, lassée) C’est moi.
  • Dites-moi, dit il après un instant de réflexion, pensez-vous être maître de vos décisions ?
  • Oui. (A ce stade je ne réponds plus que par monosyllabes, je suis au bout du fond du seau)
  • Ah intéressant ! Et pensez-vous être maitre de vos pensées ?
  • Non.
  • Bien ! Mais dans ce cas quelle différence faites vous avec la maitrise de vos décisions ?
  • Et bieeeen, mes pensées ne sont pas commandées, mais mes décisions sont prises consciemment.
  • Aha, mais alors qu’est ce que la conscience ?

J’avoue à ce moment m’être laissée aller au plus gros soupir de l’histoire des soupirs. Même lui n’a pas réussi à passer outre mon expression d’intense lassitude.

  • Vous savez, dit-il en souriant, tout ça ce n’est qu’une question de croyances, au final, tout ce qui est dans notre esprit ! Tout ce qui n’est pas les faits ou la réalité des objets, tout ce qu’on ne peut pas voir soi même, c’est une croyance !
  • En effet, sauf le consensus scientifique tout de même, qui peut généralement être considéré comme avéré dans beaucoup de cas.
  • Aha, non le consensus scientifique c’est aussi une croyance !
  • Ah mais non, je m’exclame, en bonne scientifique de formation que je suis.
  • Mais si, répond-il sans se démonter, ce que disent les scientifiques ne peut pas être vérifier par l’ensemble des gens, donc il relève de la croyance au même titre que Jésus qui…
  • Certainement pas, je le coupe, vous ne pouvez pas mettre la religion sur le même plan que la science. La science est vérifiée par des experts du domaine qui ont suffisamment de crédibilité scientifique, ou en tout cas dont la crédibilité peut être vérifiée au travers du nom de l’expert ou de la fiabilité de la revue qui a publié les données. Moi par exemple si vous me donnez un article de biologie, je suis capable de vous dire s’il tient la route, mais je n’ai pas besoin de faire des études de physique quantique pour faire confiance aux découvertes des spécialistes de ce domaine.
  • Mais si, car rien de tout ça n’a été expérimenté par vous, vous ne faites que croire en ce que disent les experts !

Bon sang, nous étions à deux orteils des théories du complot. Il a cependant enfin consenti, la mort dans l’âme, à me montrer rapidement les différentes options de formations qui s’offraient à moi et me préciser qu’il ne me restait que 505 jours d’indemnités, avant de clore enfin ce rendez-vous de l’enfer. Mais encore fallait-il qu’il me raccompagne jusqu’à la porte de sortie, à un étage et trois couloirs de là.

  • Mais vous savez, me dit il tandis que nous marchons vers l’ascenseur, se défaire de ses conditionnements, c’est le travail de toute une vie !
  • Certes, je réponds, de nettement meilleure humeur maintenant que je vois le bout de ce rendez-vous, sauf que moi j’ai pas toute la vie, seulement 505 jours, voyez.

Il a eu l’air de trouver le trait d’esprit irrésistible, et a rigolé de bon coeur pendant que nous changions d’étage.

  • On meurt trop tôt pour en voir le bout d’ailleurs, de votre truc, je renchéris.
  • Ah ça, à chaque fois qu’on pense, on est mort !
  • Euh non, je pensais plutôt à la mort genre décès, quand on arrête de vivre.
  • Ah mais vous savez, penser c’est mourir !

Jésus. Quoi encore ! La porte est là à quelques mètres devant moi, la libération si proche, ne le laissez pas partir à nouveau dans ses délires !

  • Et oui, car lorsqu’on pense, on n’est pas dans le présent. C’est comme ça qu’on provoque des accidents, ou qu’on se prend un poteau dans la rue (il mime un choc frontal avec talent). Donc quand on pense, on est morts car on n’est pas dans le faire.

A ce moment là, je suis au bout du rouleau de mon existence. Il y a tant de choses qui ne vont pas dans ce raisonnement. La pensée permet tellement plus que de juste être là à stupidement faire les choses. La pensée permet la création, l’ingéniosité, la remise en question, la réflexion, l’évolution, la compréhension… Mais à ce moment je n’en ai plus rien à foutre et laisse mon goût du débat au placard en lui tendant la main avec un grand sourire :

  • Je ne suis pas du tout d’accord, mais ça n’est pas grave ! Lui dis-je, impatiente de retrouver l’air libre, même celui de Porte de la Chapelle qui pue le pipi en passant sous la voie ferrée.
  • C’est ça qui est bien, dit il souriant en me serrant la pince, c’est qu’on peut ne pas être d’accord !

Et c’est sur ces sages paroles que nous nous sommes quittés, enfin.

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« Libérée, délivrée », allégorie de ma sortie du Pôle Emploi

Jésus, faites que je n’ai plus jamais à lui parler.

 

Le produit nul : arrêtez de faire semblant d’innover !

En à peine un siècle, l’humanité a innové comme jamais depuis le feu, la roue et la crème hydratante. On a remplacé les chevaux par des moteurs au pétrole, les courriers par les mails, le fixe par les SMS, et les bals mondains par Tinder.

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Slide du pouce à gauche, slide du pouce à droite, beaucoup moins fatiguant que la valse #progrès

Dans une frénésie post guerres, l’humain s’est surpassé comme pour compenser les pertes récentes en rendant la vie plus facile aux survivants. Alors il faut avouer que le TGV, c’est très utile. Les culottes, c’est très confo. les machines à laver, c’est top. Ikéa, c’est pratique. Internet, c’est comme un sacré 3e poumon.

Mais les gars, à un moment faut arrêter de faire semblant. Quand vous sentez que vous avez pas l’idée du siècle, laissez tomber. Franchement, ça SE VOIT que vous ramez dans le cambouis. Au bout d’un moment on est pas SI CONS QUE CA, c’est pas parce que vous nous dites que ce que vous avez pondu est une innovation que ça a soudain pas l’air d’être sorti d’un vieux cul.

Non mais regarde moi ce que j’ai vu à la télé tout à l’heure :

#Innovation2017 : la baguette déjà tranchée

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Et en plus elles roulent sur des tomates !

Non je vous assure, on en est là. C’est à dire que quand quelqu’un a inventé l’eau courante, c’est vrai que ça a arrangé tout le monde, rapport au fait que plus personne n’avait à se taper des kilomètres en extérieur pour remplir la gamelle de Kiki.

Mais l’enthousiasme qui nait devant une innovation d’exception peut éventuellement s’essouffler devant ça :

Homme souriant face caméra : « Ma petite Julia je suis vraiment super désolé, je suis encore rentré tard hier je suis resté avec mes potes, je te promets que je le referai plus, je rentrerai plus tôt pour te filer un coup de main »

Voix de femme + texte qui s’affiche : AIDONS CELLES QUI AIDENT TANT

Voix de femme sur images de sandwichs : Déja fendue, c’est si simple et si gourmand !

Voix de femme sur image produit : La Boulangère, Rendons le monde meilleur

On comprend que Julia = bobonne, visiblement la responsable officielle des sandwichs, qui sera drôlement soulagée maintenant qu’elle n’a plus à passer quinze secondes de son temps à trancher les baguettes.

On comprend également que selon la marque La Boulangère et son agence de pub, tout ce que la femme demande, c’est un homme qui lui donne un coup de main, comme un genre de subordonné domestique. Et là dessus je renvoie au post très juste d’Emma qui a pas mal tourné ces dernier temps sur la charge mentale. Pour faire court, la charge mentale c’est la responsabilité qui pèse sur une seule personne de foyer (généralement la femme selon les statistiques) de savoir ce qui doit être fait (ici sur le plan domestique). Que faut il écrire sur la liste des courses ? A quelle heure le bébé est il supposé faire la sieste ? Où est rangée la serpillère ? Si une seule des deux personnes du couple connait la réponse à ces questions, alors elle supporte seule cette charge mentale, tandis que l’autre considère que son rôle est uniquement de la suppléer.

Mais heureusement, grâce à La Boulangère, le pain est maintenant déjà tranché ! Quel soulagement ! La charge mentale s’effondre soudain.

Cependant une chose reste encore peu claire : à quel moment le mec a aidé qui que ce soit à quoi que ce soit, vu que c’est même pas lui qui a fendu les baguettes ?

Bref, vraiment merci encore aux génies du market qui ont enfin mis le doigt sur un vrai besoin du quotidien. Pour les moments de disette créative, je me permets de leur suggérer de nouvelles options parfaitement innovantes :

#InnovationDuTurfu : la brosse à dentifrice

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Ne me dis pas que tu trouves ça mal fait, mon fichier ppt et moi serions hyper vexés :’/

Grâce à la brosse à dentifrice, plus besoin de presser le tube de dentifrice sur votre brosse à dents : le dentifrice est intégré dans le manche de la brosse ! Vous n’avez plus qu’à appuyer sur le tube-manche pour faire sortir du dentifrice sur les poils… Et à brosser ! Quel bonheur.

#InnovationDuTurfu : le PipiQ et le PQaca

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En jaune le PipiQ, en blanc les épaisseurs soin d’anus pour PQaca

Dur de savoir quelle quantité de papier prendre quand on est aux toilettes ! Avec ce produit, fini les prises de cul ! Le PipiQ est prédécoupé à la taille optimale pour essuyer un pipi moyen, tandis que le PQaca est une couche plus épaisse et imbibé d’aloe vera, pour un anus propre et hydraté !

Chers industriels, si même avec ces fantastiques suggestions toutes fraiches et dépourvues de tout brevet ni protection de droit d’auteur vous ne trouvez pas satisfaction, alors plus personne ne peut rien pour vous. J’insiste, c’est cadeau !

Et pour conclure, comme disait la nana de la météo M6 il y a à peine 7 minutes :

« Passez une très belle journée à tous ! »

Missmétéo

 

Allez viens en Géorgie, on est bien !

Il y a des endroits dont la plupart d’entre toi n’a jamais entendu vraiment parler. En tout cas pas au point d’en avoir réellement une idée préconçue. Par exemple, quand je dis Japon, tout un chacun pense manga, sushis et robot à pipes. Quand je dis Etats-Unis, on pense Hollywood, armes à feu et obésité morbide. Angleterre = royauté, fish & chips et Harry Potter. Groenland = glace, glace et glace. Bref tu vois le truc.

Et puis un jour un de tes amis t’apprend qu’il va se marier avec sa copine géorgienne. En Géorgie. Et tu te rends compte que depuis des années que tu la connais et que tu connais sa nationalité, tu ne sais toujours pas placer correctement son pays sur la carte.

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C’est là

Et quand on te dit “ça t’évoque quoi la Géorgie”, à ta grande honte tu es obligé de répondre “erm… Le pays de Georges ?” => ce qui est absolument faux, puisque d’après mes informations, les géorgiens appellent leur pays Sakartvelo, ce qui n’a strictement aucun rapport avec la choucroute (et aucun non plus avec Georges). C’est d’autant plus surprenant que le président et le premier ministre actuels s’appellent tous les deux Guiorgui, ce qui est donc totalement cohérent avec la théorie voulant qu’elle tire son nom du “pays de Georges”. En fait la Géorgie semble souffrir du syndrôme de l’Allemagne, qui s’appelle Deutschland à domicile et Germany à l’international. Un triplement de personnalité qui ne semble poser de souci à personne : excellente idée, avec 197 pays dans le monde c’est vrai qu’il semble judicieux d’inventer plusieurs noms à chacun, histoire de compliquer un peu la tâche. D’ailleurs, je propose qu’on appelle la France “Engrèvie” en interne, histoire d’affirmer un peu plus notre identité nationale. Chers expatriés d’Afrique, d’Asie, d’Europe ou d’ailleurs, sachez que l’Engrèvie vous accueillera à bras ouverts à la simple condition de 1) trouver un travail (sans boulot pas de grève ben oui) et 2) ne pas y aller en signe de protestation contre X événement aléatoire. Bien sûr toute participation à une manifestation vous permettra de différer votre recherche de taf, on n’est pas des monstres (surtout que je pointe moi même à Pôle Emploi, donc évitons la mauvaise foi).

Bref, la Géorgie. Je n’avais pas la moindre idée de sa localisation précise, ni de ce à quoi ça ressemblait. Et bien figure toi qu’en Géorgie, outre mon frottis (cf post précédent), j’y ai trouvé :

  • Un mariage magnifique
  • Une culture de la fierté puissance virilité
  • De la bonne bouffe en sauce
  • Des montagnes, des monastères, et des monastères dans des montagnes

THE WEDDING

Plan d’eau, ballons multicolores et arche fleurie, caricaturiste, marié ému et mariée rayonnante, jusque là on est sur une recette éprouvée du mariage 1000 carats. Quelques petites spécificités cependant. D’abord, l’animation du dîner. Chez nous en Engrèvie, c’est festival de textes, chansons et powerpoints contenant photos d’enfance et dossiers alcooliques de la période étudiante, voire un jeu de type Les Zamours où chacun espère que les réponses des mariés différeront, mais où au final rien de bien fou ne se passera dans la mesure où personne n’a osé poser les questions de cul, à cause de mamie Ginette qui pourrait prendre mal qu’on parle du goût de sa petite fille pour les cuni. En Géorgie, point de tout ça, le rétroprojecteur et l’écran qui se déroule du plafond sont allègrement remplacés par des danses mirifiques d’hommes en collants. Car si en France nous sommes parfaitement dépourvus de danse nationale (à moins qu’on n’adoube le French Cancan ?) (perso je suis pour, ça va drôlement égayer les fêtes nationales), en Géorgie ils disposent d’une tradition chorégraphiée bien spécifique. Les danseurs miment le combat, sautent, tournent, se croisent, font des étincelles en entrechoquant leurs (vrais !) sabres, mélange d’allégorie de la guerre et de la fierté masculine, saupoudré de grâce et de séduction. Car il y a également des danseuses géorgiennes, absolument, qui sont assez anecdotiques d’après ce que j’ai pu voir : elles apparaissent ici ou là pour trottiner au milieu de la choré masculine, toute de robes et de longues tresses postiches vêtues, les lèvres tartinées de rouge et d’un sourire qui minaude, mimant la fière jeune femme que seul l’un des vrais guerriers pourra conquérir au péril de ses collants. Real shit.

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Ya pas à dire, ça a de la gueule

N’empêche que quand les jeunes mariés ont fait leur danse d’ouverture de bal ça avait une autre gueule que les sempiternelles valses qui donnent le tourni : plié jeté sauté, séparation et retrouvailles, ça sentait les heures de répète (et sans collants en plus). J’aurais adoré voir le mélange avec le French Cancan.

Deuxième particularité géorgienne : la guerre du mic’. Car en Géorgie, les paternels doivent se disputer la propriété du micro, afin de faire des discours improvisés entre chaque plat. J’aurais aimé vous informer de la teneur des discours en question, mais le champion toute catégorie étant le père géorgien de la mariée, j’avoue ne pas être en mesure de traduire l’intégralité de ses propos. Belle verve en tout cas.

Mention spéciale au buffet, qui était servi sous forme de tapas géantes sur chacune des tables, et qui nous ont mis à rude épreuve le temps que les mariés arrivent et que le premier georgien de notre champ de vision s’autorise à commencer à manger, nous donnant le feu vert pour nous même nous jeter dessus.

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Davut et Iri, thank you for that! En plus un mariage sans l’Aventurier ni Emile et Images, vraiment ça n’a pas de prix.

Bien sûr comme à toute célébration l’alcool coulait à flots, et comme nous étions peu ou prou sous la Russie, quoi d’étonnant à y trouver des shots de vodka pure ? Absolument rien. Et ainsi fut il. Quelques shots plus tard, le dialogue suivant eut lieu, me rendant terriblement fière de ma moitié :

Frère du marié : Tiens M. Akov, je te présente ma copine

Copine (pas timide) : Salut ma couille !

M. Akov (pas timide non plus quand bourré) : Salut ma couillasse !

Copine : ah ben on m’avait dit que t’étais timide, mais en fait non

M. Akov (toujours bourré) : Hahaha yé souis timide, eh ! Je peux aussi faire l’hélicoptère avec ma bite !

Eeeeet, fermez les guillemets !

Heureusement, la famille du marié étant de type détendue du slip, nous n’eûmes pas affaire à la brigade des moeurs georgienne ce soir là.

Là où je suis vraiment fière de nous, c’est que nous avons réussi à faire une brillante démonstration de la richesse de la culture française à nos amis géorgiens, qui certes connaissaient aussi bien que nous le concept de la chenille (bien que la personne de tête l’ai malencontreusement menée entre deux tables trop étroites pour permettre un retour par le même chemin) (“Ohlalalalaaaa l’ERREUUUR, L’ERREUUUR” beuglait Vic bourré, les mains sur mes épaules), mais là où je pense qu’on les a soufflés, c’est sur notre juste interprétation des Sardines, du bien connu Patrick Sébastien. Nettement moins esthétique que les danseurs en collant, mais relativement festif malgré tout, et beaucoup plus collaboratif (que celui qui a dit “beauf” au fond se dénonce !). Mais l’apothéose, je crois que ça a été l’interprétation de Gilbert Montagné – Sous le Soleil des Tropiques, by Zozo, qui avait pour l’occasion enfilé ses lunettes de soleil ainsi qu’un certain nombre de shots translucides. Là où elle a vraiment assuré, en plus de ses talents d’imitatrice hors pairs (ah ce balancement de tête, cette bouche ouverte vers le plafond), c’est la justesse de son interprétation, car figure toi que la meuf avait carrément fermé les yeux derrière ses lunettes opaques. Au point qu’elle n’a même pas remarqué qu’une bonne quinzaine d’entre nous ont envahi la scène autour d’elle pour mimer les divers instruments. Tant d’implication ça a quelque chose de magique (“giiiique”).

LA CULTURE VIRILE

Outre les danses en sabre et collants, les géorgiens ont également une façon d’être qui respire la virilité et la mentalité guerrière. Jamais un géorgien ne va spontanément décrocher un sourire à un inconnu. En cela, le géorgien est l’antithèse de l’américain, qui lui ne décroche jamais sa banane de sa face, quitte à se froisser un zygomatique. La meilleure preuve étant qu’aux Etats Unis on ne dit pas “Bonjour” comme tout un chacun, mais “How You Doin’?”, soit pour les non bilingues “Ca va ?”. Et quand on sait que l’expression “ça va” vient d’une époque où il signifiait “votre caca est il sain ou souffrez vous d’un déséquilibre défécatoire ?” parce qu’à l’époque ils n’avaient ni laxatifs ni crèmes anti hémorroidaires, on se dit que les américains sont encore plus intrusifs que nous, qui nous contentons de le demander à nos collègues et amis, et pas aux parfaits inconnus. Aux gens dont le transit nous intéresse vraiment, quoi. Bande d’hypocrites d’américains. Cela dit, ne répondez jamais “I am OK, thank you” à un américain inconnu qui vous dit “How you doin’?” à votre entrée dans un magasin ou un ciné. C’est juste le mec de la sécurité qui est poli, il n’en a rien à cirer de votre caca en vrai. D’ailleurs, au début je leur répondait systématiquement, et j’ai rapidement arrêté en constatant que ma réponse que je croyais appropriée était visiblement source d’infinie perplexité.

Mais revenons à nos Georgiens au travers de l’anecdote suivante, parfaitement représentative de la population. Après The Wedding, seuls Zozo et Biker ont pu rester la semaine avec moi pour découvrir le pays, les autres étant rappelés à l’ordre par la société capitaliste (et leur bulletin de salaire), M. Akov compris. Nous étions donc tous trois tranquillement installés en terrasse d’un restaurant en bord de route, sous un parasol Coca Cola bienvenu en cette journée réglée à minimum 180° en chaleur tournante. Le repas était excellent (en dehors d’une sorte de limonade industrielle vert fluo que le pauvre Biker faisait semblant de kiffer) et venait d’être englouti avec appétit, lorsque l’armoire à glace taciturne qui semblait être le propriétaire de l’endroit vint débarrasser quelque plats.

  • It was very good ! S’exclama aussitôt Zozo dans un bel élan de ferveur bilingue.
  • Yes, very very good, j’ai alors renchéri fort à propos, dans l’idée de démontrer ma capacité à développer une idée à l’aide de mots pertinemment choisis.

Nous nous attendions à un léger sourire, ou du moins un “thank you”, voire un signe de tête appréciateur, mais point de tout cela. L’homme ne bougea pas un muscle de son visage, et nous commencions à nous demander s’il nous avait entendu, ou si par malheur “very very good” signifiait “quelle sale tête” en georgien, lorsque soudain, l’armoire leva sa grosse patte au dessus de l’épaule de Zozo, et, avec lenteur mais conviction, il la tapota. Puis tel le Lucky Luke de la vaisselle, il reparti sans rien dire chargé de nos plats quasi nettoyés.

Un grand moment d’émotion.

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Géorgien au comble de l’émotion

DE LA BONNE BOUFFE EN SAUCE

Tout cela nous conduit tout naturellement à parler de la bouffe géorgienne. Si ce que tu imagines ressemble à une profusion de plats mêlant bouchées épicées, plats en sauce mijotés et raviolis géants, alors BRAVO car c’est exactement ça ! Les Géorgiens empruntent aux russes des viandes mijotées parfaitement relevées, et sont notamment spécialisés dans les sauces et bouillons en tout genre. En revanche pour les végétariens, ça ne va pas être facile, car la viande est partout… A l’exception des plats de champignons, qu’ils cuisinent hachés avec des oignons ou entiers et bien assaisonnés, un régal.

Mais le clou est certainement le raviolo géant (car le singulier de ravioli est effectivement raviolo, c’est toujours sympa à savoir !) (à défaut d’être utile), j’ai nommé le dumpling (ou Khinkali en VO). Le dumpling, c’est comme un gros sac de pâte molle et un peu collante (type ravioli chinois vapeur) rempli de viande hachées en sauce. Oui, en sauce, car sache que le dumpling n’hésitera pas une seconde à te couler sur la face si tu mords anarchiquement dedans. En Géorgie on est disciplinés, bordel ! Alors on se concentre et suit le mode d’emploi du dumpling :

  1. Le saisir délicatement via sa petite… hem, son petit bout dur
  2. Le mordre précautionneusement sur le côté
  3. Coller sa bouche sur l’orifice ainsi créé
  4. Aspirer le jus
  5. Dévorer le reste

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Attention au piège classique des repas en mode buffet : comme en Géorgie tu commandes les accompagnements, les viandes et les légumes séparément, la tentation est grande de multiplier les commandes pour tout goûter. Et là prend garde, car le Géorgien n’hésite pas à charger chaque assiette d’assez de nourriture pour nourrir ta mère, la mienne, et probablement leurs mères avant elles si elles étaient là. C’est ainsi que Vic s’est largement fait avoir lors de notre premier resto post The Wedding en commandant… TRENTE dumplings. TRENTE. Bien sûr malgré tous nos efforts nous ne réussimes pas à les finir (à 13), dans la mesure où nous avions déjà bien attaqué les plats. Ah, et évitez aussi la kachapouri 3 fromages ou pire, fourrés aux haricots rouges. C’est tout simplement inhumain.

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Cholestérol camouflé

Cela dit, notre meilleur repas (#ironie) a tout de même été celui que nous avons pris dans la ville d’Akhaltsikhe, où nous avons tourné un bon moment avant de trouver notre hôtel, munis uniquement du GPS marocain (= Biker qui descendait sa vitre pour demander aux passants s’ils avaient pas croisé notre hôtel des fois).

Résultat, lorsque nous nous sommes enfin installés il était aux alentours de 22h30.

Résultat bis : tout était fermé. Ah oui, à Akhaltsikhe on rigole pas, faut manger tôt ou s’asseoir sur son estomac (gymnastique que la Fédération des Kinésithérapeutes Français déconseille formellement). Heureusement, une petite supérette de coin de ruelle était encore ouverte à l’échange de quelques GEL (GEorgian Lira, monnaie locale) contre des denrées alimentaires. Et c’est ainsi que nous avons eu notre meilleur menu du séjour : chips, TUC, et glaces, le tout à moitié vautrés autour de la seule table de la chambre d’hôtel, qui faisait environ 50 cm de haut.

Miam.

PS : je ne recommande en revanche pas du tout la spécialité sucrée du coin, le churchkhela. C’est un mix entre une gelée de fruits fourrée de cacahuète et un plug anal (rapport à sa forme). Vraiment, restez au salé c’est plus sûr.

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A insérer en bouche

DES MONTAGNES, DES MONASTERES, ET DES MONASTERES DANS LES MONTAGNES

Car le Géorgien est très pieux et de confession orthodoxe, il a au fil des génération bâti un nombre incalculable de monastères et autres bâtisses sacrées. Et comme la Géorgie est un pays montagneux, fatalement la plupart d’entre eux se trouvent perchés. Tout ça ajouté à la récurrence surprenante d’anciennes cités troglodytes, on obtient des lieux de culte littéralement nichés dans la roche. Haut. Du genre à devoir se faufiler dans des boyaux rocheux par des échelles en carton, et le long des corniches munies de vieilles rambardes en fer de l’épaisseur d’un spaghetto (c’est comme pour raviolo). De quoi profiter de sacrés panorama (sacrés parce que c’est des monastères, t’as compris ?).

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Zozo en a même conçu une épiphanie après la visite d’une de ces fantastiques constructions perchées :

  • Aïe ! (elle a regardé dans son short) Je me suis faite piquer par un poil pubien qui repousse.

Excellent ! Le soir même, Biker se plaignait de s’être piqué la lèvre avec son propre poil de barbe.

Alors soyez vigilants les amis, parce qu’on n’est jamais aussi bien trahis que par sa propre pilosité, sachez-le.

Mais dans les montagnes, on trouve aussi des cons qui se perdent. Et quand je dis “des” cons, je veux bien sûr dire “trois”. Plus précisément, un marocain se trimballant un quintal de fringues parce qu’il ne sait pas trier un placard (enfin pour le coup il avait laissé le bazar à l’hôtel), une angoumoisine avec un poil pubien rebelle, et moi même tentant de lire un descriptif de l’itinéraire que nous étions supposés prendre. Et puis bien sûr, il y avait Bob le chien, échappé de sous une clôture d’un fermier du coin, et qui nous a accompagnés pendant les 11km de notre périple avec la désinvolture propre aux athlètes canins.

Au début, nous étions confiants sur le fait que nous suivions le bon itinéraire (supposé faire 5 km), mais lorsque le texte a commencé à préciser que nous étions censés être à 50m au dessus de la rivière, alors que le remblai sur lequel nous cheminions culminait à à peine 95 cm, puis que la rivière à gauche s’est muée en rivière à droite, nous avons commencé à être pétris par le doute. Et lorsque 10 km plus tard nous n’avions toujours pas croisé la queue de l’ombre du village supposé signer la fin de l’excursion, nous avons tout simplement renoncé à y croire. Pour couronner le tout, il pleuvait, et il se peut que nous ayons croisé en chemin un poulain mort-né étalé dans son placenta, sa mère encore tremblante d’avoir mis bas et son éleveur en train de lui tapoter l’encolure. Il a également fallu que nous trouvions un endroit où Zozo, l’angoumoisine avec la plus petite vessie de toute la Charente, pourrait trouver un endroit où la vider sans risquer que Bob en profite pour lui lécher l’anus (Zozo a des appréhension très spécifiques). Nous avons même hésité à rebrousser chemin, mais après avoir abattu tous ces kilomètres de gadoue dans laquelle trempaient des dizaines de grenouilles plus ou moins décédées par suite d’écrabouillement sévère, et surtout parce que notre point de départ n’abritait pas de taxi susceptible de nous ramener à bon port, nous avons bravement continué.

Pour être parfaitement honnête, la balade n’était pas exempte de panorama pas dégueu.

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Au bout de quelques heures de contemplation sportive, nous avons fini dans un micro village comprenant un hôtel de luxe flambant neuf parfaitement vide et fermé, quelques modestes habitations rurales, et… Un poste de garde frontières Georgie/Russie/Tchétchénie, devant lequel discutaient les seuls être vivants du secteur en dehors de Bob et nous. Après quelques baragouinages en anglais, les gentils militaires ont accepté d’appeler un taxi pour nous ramener, supposé arriver une demi heure plus tard. Devant nos mines mi reconnaissantes mi humides de pluie mêlées de sueurs, ils nous ont alors invités à patienter à l’intérieur de leur guérite.

A l’intérieur, il y avait 8 lits superposés, un bureau, une table, une salle de bain, une télé qui passait la version locale de the Voice, et une odeur de sueur. Le tout dans une trentaine de mètres carrés. S’ensuivit un dialogue parfaitement incompréhensible entre le Major, qui nous faisait défiler toutes ses photos de famille, les yeux brillants de fierté, accompagné de commentaires plus ou moins anglophones, et Zozo, qui a un vrai don pour communiquer avec les gens qui parlent très mal anglais. Pour les remercier des boissons chaudes qu’ils nous avaient gentiment offertes, nous avons voulu leur offrir les cigares cubains que Couscous avait oubliés pendant The Wedding en la possession de Biker. Mais ils étaient tellement choux qu’ils n’ont accepté le cadeau qu’en échange d’une pleine poignée d’une sorte de Snickers local (mais en encore plus sucré), ce qui était très généreux au vu du faible nombre de provisions disponibles dans leurs placards. Dommage, nous n’avons jamais pu les finir pour cause de risque de diabète.

Morceaux choisis

Biker – C’est quand même bizarre : les vaches mangent de l’herbe et elles font du gras. Nous on mange de l’herbe on fait pas de gras

Pendant une partie de UNO

Moi – Tu mets quelle couleur ?

Zozo – Cinq.

Zozo (en pleine lecture du guide anglophone) – Tiens y’a des singes dans le monastère !

Moi – …Non zozo monk ça veut dire moine.

Blague de Biker – une fois à Istanbul j’ai vu deux paons et j’ai fait PAN PAN

Zozo (au musée de Staline à Gori) : en fait il était super beau gosse Staline !

(et c’était vrai)

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Alors courez en Géorgie, les amis !

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Biker qui dabbe, comme un mec de l’année dernière

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Moi même en transe

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Zozo admire le paysage

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